L’eau, ressource et élément « structural » de la Villa Impériale
Proposition de synthèse de la Conférence de Roberto Righi,
Direttore Archeologo Coordinatore Soprintendenza per i beni archeologici del Lazio.
Le site archéologique de la villa Domizino est situé dans le Parc National du Circeo, à une centaine de km au Sud-Est de Rome.
En Italie, l’archéologie et globalement le patrimoine culturel est rapproché de l’espace naturel, réunis sous un même ministère. C’est donc dans cette pensée que la Villa Domiziano est incluse dans un parc national.
Le site est sur la côte Tyrrhénienne, dans un paysage lagunaire parsemé d’étangs d’eau salée et de canaux.
La villa est construite sur une presqu’ile bordée par un étang, « lago di Sabaudia ». C’est un emplacement stratégique puisqu’il combine à la fois le raffinement des paysages (pinèdes, forêts, paysages de plans d’eau…), la relative proximité de Rome, et une position littorale en connexion avec les principaux ports impériaux (Ostie – voir l’article sur les monnaies du port d’Ostie - , Centumcellae, Puteoli…), points d’approvisionnements en marchandises, matériaux de construction et éléments indispensable à une villégiature impériale (objets d’arts, animaux sauvages, mets fins et marchandises périssables…)
Aujourd’hui seule une partie du site est découverte mais par la photographie aérienne et l’imagerie satellitale on repère d’autres structures, qui permettent de restituer la superficie du domaine à presque 46 hectares !
L’espace autour du domaine impérial est bordé par de l’eau. La gestion et l’exploitation des flux hydrauliques correspondent à une pensé particulière, à l’époque romaine ; L’affirmation de la « majesté de l’empereur ». Il démontre son savoir scientifique et son origine divine en exploitant l’eau.
L’élément hydraulique était utilisé dans le complexe thermal ou encore le vivier (la « Peschiera »).
Pour cela, les ingénieurs romains avaient conçu un réseau hydraulique complexe, débutant à 2 km au Nord de la Villa avec des centaines de mètres de galeries souterraines.
Le système de collecte des eaux de pluies se basait sur le principe de l’infiltration des précipitations au travers de la dune de sable (du quaternaire) qui compose le sous-sol local. Après cette filtration, l’eau ruisselait sur les parois des galeries qui canalisaient les eaux dans un aqueduc. Cet aqueduc alimentait un réservoir dit principal, d’une capacité de près de 1600m3.
Puis l’eau était acheminée en souterrain vers des citernes centrales. Le fil d’eau était étudié pour décanter dans une pièce spécialement conçue, une chambre de décantage, puis remplissait le réservoir n°3 (Cisterna di Raccolta). Une fois le niveau maximum atteint, l’eau dérivait vers un circuit relié à un réservoir voisin, cisterna dell’eco. Il contenait aussi 1600 m3 d’eau.
En système d’appoint se trouvait encore un réseau de réservoirs dont le n°4. L’utilité du réservoir était probablement moindre donc durant l’époque romaine il fût transformé en magasin ou ergastulum (logement ou geôle sous-terraine pour travailleurs ou esclaves). Cette citerne est ornée de nombreux graffiti.
Le vivier se présente sous la forme d’un grand bassin bordé d’une colonnade, qui rappel le Canope de la Villa Hadriana. Il était alimenté par un réservoir dédié à l’alimentation du vivier, le réservoir n°5. On y a retrouvé une conduite en plomb marquée d’une inscription pour l’empereur Domitien.
Comme autres constructions et dépendances de la Villa, il existe un complexe daté tardo-républicain ; on ne connait pas encore les autres endroits servis par l’eau de l’aqueduc et de quelle façon elle arrivait à servir la partie sud occidentale de la Villa et les thermes, ou de quelle façon elle alimentait les autres réservoirs et les structures au nord et à l’ouest. On ignore également comment était conçu le système des égouts.
Aujourd’hui la villa est inclue dans un parc de 8500 hectares. Il est placé sous une loi instituée en 1934 (sous Mussolini avec une « Milizia Forestale » qui encourage la « visite à but scientifique, artistique et touristique ». Le parc dans son aspect scientifique (biologie, art et archéologie) est étudié avec l’outil SIG. Il permet une analyse des structures en élévation ou en sous-sol. On utilise aussi la photo interprétation pour restituer les dépendances, axes et réseaux rayonnants entre les bâtiments.
On mentionne encore divers édifices de grande taille, bien conservés, qui agrémentait la villégiature impériale en divertissant la cours, ou en illustrant l’idéal scientifique ou divin de l’empereur.
Le complexe était connecté avec la navigation méditerranéenne grâce à un « Port-Canal ». Le site fût réemployé durant la période médiévale avec la Casarina (église) aux XI-XIII° siècles. De nombreux bâtiments romains furent alors réemployés à cette période.
C’est probablement le réemploi continu de ces bâtiment qui permit de les faire parvenir jusqu’à nous.
Aujourd’hui seule une portion de la villa est connue mais le site contient encore de nombreux vestiges qui doivent être étudiés pour mieux restituer une villa impériale. Mais cela doit être accompagné d’un financement régulier, qui aujourd’hui tarde à arriver.
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